Le Jeu de Paume souffre de ses martyrs sans guillemets

L’exposition Phantom Home (« Foyer Fantôme ») d’Ahlam Shibli au Jeu de Paume à Paris continue de susciter la colère depuis son ouverture le 28 mai. Après avoir provoqué des centaines de messages de protestation contre des photographies mettant en scène la glorification des « martyrs » palestiniens, le ministère de la Culture et le musée ont essayé de jouer l’apaisement en mettant des panneaux d’avertissement. « C’est une rigolade », rétorque le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif).

A l'extérieur, aucun changement à signaler. L'affiche de l'exposition incriminée nous accueille toujours au-dessous du drapeau tricolore du mât planté devant le Jeu de Paume. Malgré les mesures de sécurité supplémentaires annoncées, il n'y a pas de portillon détecteur de métal, un seul vigile à l'entrée contrôle les sacs des (peu nombreux) visiteurs ce mardi midi.

Death (« Mort ») 2011-2012

L’exposition Foyer Fantôme ne déplace pas de foules, mais continue de susciter des réactions violentes - à l'image de son sujet. L'artiste palestinienne Ahlam Shibli, née en 1970, de renom international, évoque, à travers la série Death (« Mort ») 2011-2012, une série de 68 photos prises en Palestine et spécialement commandées pour l'exposition, l'entretien de la mémoire et la glorification des « martyrs » par les familles et la société palestiniennes. Le problème, c'est qu'il n'y a pas de guillemets dans les légendes des photos qui célèbrent le nom et la date de mort de chaque « martyr » placardé ; il n’est pas non plus mentionnée la nature des actes de ces « unités martyrs », « brigades des martyrs », « tombés martyrs », « monument aux martyrs », « fils martyrs », « martyrs portés disparus ou détenus » tant glorifiés par les familles palestiniennes et sur les affiches qui apparaissent dans les photos de l'artiste.

Depuis l'émoi exprimé par le Crif (« C’est inacceptable qu’en plein Paris, cette série fasse ainsi l’apologie du terrorisme ») le 5 juin et des centaines d'appels téléphoniques, de courriels et de messages, le ministère de la Culture et le Jeu de Paume jouent l'apaisement. Depuis samedi dernier, des panneaux d’avertissement s’affichent à l’entrée de l’exposition et devant les photos concernées : « Afin d’éviter tout malentendu, le Jeu de Paume souhaite préciser que, dans la série Death, l’artiste Ahlam Shibli présente un travail sur les images qui ne constituent ni de la propagande ni une apologie du terrorisme. Comme l’artiste l’explique elle-même : " Je ne suis pas une militante. Mon travail est de montrer, pas de dénoncer ni de juger. " »

« Elle fait un travail de propagande »

Pour Marc Knobel du Crif, chargé de l’affaire, ce texte « est une rigolade. On ne dénonce pas les photos, on dénonce les légendes. Nulle part ne sont mentionnées les dizaines et les dizaines de victimes israéliennes massacrées. La photographe ment. Elle fait un travail de propagande. »

Quant à la « délégation de l’ambassade d’Israël » qui, selon le Jeu de Paume cité dans un article du journal Le Monde publié le 11 juin, aurait visité l’exposition « sans susciter de réaction négative », Marc Knobel précise : « C’est complètement faux, l’ambassade d’Israël était particulièrement choquée et a écrit à la ministre de la Culture ».

Le Jeu de Paume n’était pas disponible pour une interview ce 18 juin. Entre-temps, la manifestation devant le musée, d’abord prévue le 16 juin, a été reportée au 30 juin et la polémique semble repartie avec encore plus de vigueur qu’avant l’apaisement.

(Siegfried Forster - RFI)

[NOTE DE 'AMI ARTSI : il serait intéressant que Siegfried Forster nous explique où est "la Palestine", qui en est le président, quelles en sont les frontières, quelle est sa capitale... A le lire, on pourrait croire qu'il parle d'un pays. Quant au qualificatif d'artiste, j'aurais mis le mot entre guillemets, car A'hlam Shibli est plus proche d'une militante que d'une artiste et son expo tient plus de la propagande que de l'exposition artistique !]